Rabat
top of page

RACHID M'BARKI, L'HOMME QUI N'A PAS PLIÉ

  • 26 juin
  • 7 min de lecture
rachid m'barki BFMTV Maroc Sahara

Journaliste franco-marocain au parcours exemplaire, Rachid Mbarki a été brutalement évincé de BFMTV dans une affaire trouble et encore non élucidée. Aujourd’hui, c’est au Maroc qu’il retrouve sa voix, sa dignité et la reconnaissance d’un peuple qui ne l’a jamais oublié.


Pendant plus de deux décennies, Rachid M!barki a incarné la rigueur et l’élégance du journalisme télévisé en France. Né à Toulouse, il s’est imposé à force de travail, de sérieux et de talent. Sur BFMTV, il devient l’un des visages les plus appréciés de l'écran, notamment lors des éditions de nuit qu’il présentait avec sobriété et justesse. En parallèle, il est chargé en 2020 de la présentation de Faites entrer l'accusé.


En janvier 2023, Rachid Mbarki est brutalement mis à pied par BFMTV, accusé d’avoir diffusé, à l’antenne, des contenus supposément orientés par des intérêts étrangers. L’affaire, largement relayée par certains médias, le présente rapidement comme l’élément fautif, sans qu’aucune preuve formelle de corruption ou d’intention malveillante ne soit jamais rendue publique.


Aujourd’hui, Rachid Mbarki a choisi de poser ses valises au Maroc. C’est ici, sur la terre de ses origines, qu’il reconstruit avec dignité sa trajectoire, loin des projecteurs parfois cruels. En décembre 2023, il rejoint le groupe marocain Éco-Médias et devient animateur sur Atlantic radio. Aujourd'hui, il co-anime la matinale de Luxe Radio.


Ce mercredi 25 juin, Rachid Mbarki était l'invité de l'émission Tarik Talk où il est revenu sur l'affaire BFM TV, sa nouvelle vie au Maroc ainsi que d'autres thématiques.


Voici les principaux passages de l'interview :


Tarik : On fait un retour sur l’affaire BFM TV. Sans rentrer dans l’intimité du dossier, évidemment. On n’est ni un tribunal, ni une commission d’enquête. Nous sommes en juin-juillet 2025. Où en est-on dans cette affaire ?


Rachid : C’est toujours en cours. C’est pas terminé. Je pense même que c’est loin d’être terminé. Il y a encore des instructions. Il y a aussi le volet civil, aux prud’hommes, qui n’est pas clos. Voilà. Donc c’est en cours. Je suis ça d’ici, avec mes avocats. Ils font un travail considérable. Je ne peux pas dire grand-chose de plus, parce que moi-même je n’en sais pas beaucoup plus.


Tarik : Concrètement, cette affaire... qu’est-ce qu’elle t’a coûté ?


Rachid : Tout. J’ai tout perdu. Je dis ça avec naturel. Une carrière forgée depuis plus de trente ans, seul. Et du jour au lendemain, plus rien. C’était très dur à vivre, très compliqué. Tout un monde s’effondre. Il m’a fallu du temps pour comprendre, pour me reconstruire. Mais franchement, si c’était à refaire, je le referais sans hésiter. Clamer notre pays, notre Maroc dans son intégralité, de Tanger à Lagouira comme on dit, ça n’a pas de prix. C’est le prix de tous les sacrifices. Même si c’est dur, même si ça a affecté ma vie personnelle de manière extrême. J’ai même pas les mots. Mais si c’était à refaire, je signe tout de suite.


Tarik : Tu as mentionné tout à l’heure la dimension diplomatique de l’affaire. Beaucoup de gens ont fait le lien entre ton éviction et les tensions entre Paris et Rabat à l’époque. Est-ce que tu penses avoir été une victime collatérale de cette crise diplomatique ?


Rachid : Je ne peux pas l’affirmer. Mais je ne peux pas non plus l’exclure. Ça fait partie des hypothèses plausibles. On ne le saura probablement jamais de manière certaine, mais c’est une possibilité.


Tarik : Certains disent que ton éviction a été utilisée comme un message envoyé à Rabat, une forme de signal politique. Tu partages cette hypothèse ?


Rachid : Tout est possible. Je ne suis pas dans les coulisses du pouvoir, ni dans les confidences des uns ou des autres. Mais c’est une hypothèse qui tient la route.


Tarik : Aujourd’hui, tu vois cette même chaîne, BFM TV, parler de la marocanité du Sahara sans problème. Ça ne te fait pas mal ?


Rachid : Je ne regarde plus cette chaîne. Je l’ai aidée à naître en 2005, j’y ai cru. Mais aujourd’hui, quand je vois ce qu’elle est devenue, j’ai le sentiment d’avoir participé à la création d’un monstre.


Tarik : Et si demain, cette chaîne venait te proposer de revenir, de te réhabiliter ?


Rachid : Jamais de la vie. Ce n’est même pas envisageable.


Tarik : Cette affaire a bouleversé ta vie. Tu as évoqué que ta mère est décédée après ces événements. Tu penses que cela a eu un lien ?


Rachid : Je pense que oui. C’est difficile à dire, mais je pense que la douleur de me voir tomber comme ça a joué. Elle est partie en juillet 2023. C’est une perte immense.


Tarik : Tu es passé par une audition à l’Assemblée nationale. Je me souviens de ces images, elles m’avaient marqué. Tu l’as vécu comment ?


Rachid : Comme une violence extrême. Quand je suis sorti de l’audition, j’étais seul. J’ai pleuré. C’était trop fort, trop brutal. Un moment que je n’oublierai jamais.


Tarik : Et malgré tout, tu dis que tu referais exactement la même chose ?


Rachid : Oui. Quand il s’agit de l’intégrité de mon pays, je n’hésite pas. On ne peut pas se taire.


Tarik : Maintenant, j’aimerais que l’on passe à la deuxième grande partie de notre échange. Parlons de l’après. De ton installation au Maroc, de ta nouvelle vie. Pourquoi le Maroc ? Pourquoi ce choix après l’épisode BFM TV ?


Rachid : Alors, permets-moi de te corriger tout de suite : ce n’est pas une expatriation, c’est un rapatriement. Je n’ai pas quitté ma patrie. J’ai regagné ma patrie. Pourquoi le Maroc ? Parce que c’était une évidence. Quand on cherche un refuge, on rentre à la maison. Quand on veut retrouver une certaine quiétude, on rentre chez soi. C’est ce que j’ai fait.


Tarik : Comment s’est passée ton arrivée au Maroc ? Parlons d’abord de l’accueil de la population : la rue marocaine, les gens que tu croises.


Rachid : Très bien. Vraiment très agréable. Les gens sont chaleureux. Ils me reconnaissent souvent. Et c’est toujours des paroles bienveillantes. Des "merci", des "on est fiers de toi". Ce genre de choses. Parfois, on me tape dans le dos en disant : "Toi, t’es un homme." Ça touche.


Tarik : Et du côté de la profession ? Les journalistes, les médias, tes collègues ?


Rachid : Très bon accueil aussi. Mais il faut y mettre du sien. Il ne faut pas arriver ici en terrain conquis. Il faut montrer de l’humilité. Montrer qu’on est là pour apprendre, pas pour prendre la place de quelqu’un.


Tarik : Et les autorités ?


Rachid : Je n’ai pas vraiment eu de contact avec elles. L’accueil à la douane s’est bien passé, mais je n’ai pas eu de relations avec les autorités. Certains croient que j’ai été pistonné, qu’on m’a déroulé un tapis rouge. C’est un fantasme. Rien de tout ça. Je suis arrivé, j’ai mis du temps à me reconstruire, j’ai décroché mon téléphone, j’ai demandé des rendez-vous, j’ai cherché du boulot. C’est tout. Rien d’extraordinaire.


Tarik : Et ton regard aujourd’hui sur le Maroc ? Tu le découvres différemment maintenant que tu y vis en permanence ?


Rachid : Absolument. C’est totalement différent de venir en vacances et de vivre ici. Avant, je venais quelques fois par an. Mon corps se défendait même de s’y sentir chez lui. Parce que se dire "je suis chez moi ici", c’est accepter que tu ne l’es pas ailleurs. Et ça, c’est dur. Aujourd’hui, pour la première fois de ma vie, je me sens chez moi. Vraiment. Et ce sentiment-là, il est indescriptible.


Tarik : Et le métier de journaliste en lui-même ? Tu le vis comment ici ?


Rachid : Je prends plus de plaisir. Parce qu’ici, on n’est pas dans le négativisme permanent. On regarde le verre à moitié plein. Les interviews ne sont pas des confrontations, mais des échanges. On cherche à comprendre, pas à piéger.


Tarik : Tu travailles aujourd’hui ? On t’a vu à Atlantique Radio, et maintenant à Luxe Radio ?


Rachid : Oui. Je co-anime la matinale de Luxe Radio de 7h30 à 9h30. Une vraie matinale avec des chroniques, des interviews, très orientée économie, business, nouvelles technologies, IA, crypto…


Tarik : Est-ce que tu as reçu des propositions de grands médias marocains ? On t’imagine bien au 20h de 2M !


Rachid : (Rires) Pourquoi pas, mais ça ne m’a jamais été proposé. Et si on me le proposait, j’y réfléchirais sérieusement. Ce n’est pas un appel du pied, mais on ne sait jamais.


Tarik : Une chaîne d’info continue au Maroc ? C’est envisageable ?


Rachid : Oui, pourquoi pas. Une chaîne plus régionale, arabophone, ou même une chaîne de sport plus punchy. Il y a beaucoup à faire.


Tarik : Et dans 5 ans, tu te vois où ?


Rachid : Aucune idée. Peut-être dans un stade, à regarder la Coupe du Monde ici. On verra bien…


Tarik : Sur les accords tripartites Maroc-USA-Israël : est-ce que les médias marocains ont fait leur travail pédagogique ?


Rachid : Non, pas assez. Il ne faut pas confondre un accord d’État avec un gouvernement en particulier. Et oui, c’est un génocide qui est en cours. Mais il ne faut pas mêler cela aux accords. Il y a une histoire entre juifs et marocains, elle est là, enracinée. Le Maroc agit, il ne parle pas seulement.


Tarik : Et l’animosité algéro-marocaine ?


Rachid : Franchement ? Parfois, c’est risible. On nous accuse d’avoir volé une recette de couscous pendant la décennie noire… Ici, les gens s’en fichent. On avance. On est dans le LGV (Boraq), pas dans une locomotive à vapeur.


Tarik : Toi qui es passionné de foot : qui sera Ballon d’Or 2025 ?


Rachid : (Rires) Si ce n’est pas Hakimi, c’est un scandale !


Tarik : Les médias en font-ils assez pour sa candidature ?


Rachid : Non. Il faut le laisser évoluer. Ne pas lui mettre trop de pression. Il obtiendra ce qu’il mérite sur le terrain.


Tarik : Et les chances du Maroc pour la CAN ?


Rachid : Elles sont excellentes. Il ne faut pas se fier aux matchs de préparation. Walid [Regragui] fait ses essais, ménage ses joueurs. Ce qui compte, c’est d’avoir un effectif solide et interchangeable.


Tarik : Merci Rachid pour ton courage, ta dignité, ton engagement. Un mot pour conclure ?


Rachid : Un mot pour ma femme et mes enfants : je les aime. Ce sont eux qui m’ont sauvé. Ils m’ont permis de tenir. Merci aussi à tous ceux qui ont cru en moi, qui m’ont soutenu. Et hamdoulilah pour tout.


L'interview complète est disponible via Tarik Talk



Plus qu’un journaliste, Rachid Mbarki est un symbole. Celui d’une réussite bâtie sur le mérite. Celui d’une injustice que rien n’est parvenu à faire taire. Celui d’une résilience tranquille, nourrie de dignité, d’humilité… et d’un profond attachement à ses racines. Il incarne un patriotisme sincère, celui d’un homme resté fidèle à ses valeurs et à son pays, même dans l’adversité.


Son parcours doit inspirer. Son traitement doit alerter. Et sa reconstruction au Maroc doit être saluée. Car au-delà des studios et des plateaux, il y a des hommes. Et dans cet homme, il y a toute une génération qui se reconnaît.


À Rachid Mbarki, nous adressons notre profond respect. Et notre conviction reste intacte : vous avez été injustement réduit au silence, mais votre parole, aujourd’hui plus que jamais, mérite d’être entendue.

1 Comment


Unknown member
Jun 27

Tbark Allah il a été récompensé pour son courage et son patriotisme sans faille. Alhamdolillah quel bel exemple de résilience pour un compatriote exemplaire qui a su porter haut les couleurs du drapeau 🇲🇦 et de Tamaghrabit 👏👏👏

Like
bottom of page