LE KENYA TOURNE LE DOS AU POLISARIO
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Le rapprochement entre le Kenya et le Maroc n’est plus un simple mouvement diplomatique, mais il est désormais question d'un basculement stratégique assumé et lourd de conséquences pour le Polisario. Depuis l’arrivée de William Ruto au pouvoir en 2022, Nairobi a progressivement démantelé sa vieille posture héritée de la guerre froide. Ce revirement confirmé s'est accéléré en 2025 et aujourd’hui le Kenya est parmi les soutiens africains qui comptent pour la souveraineté du Maroc sur son Sahara.
Dès l’élection de Ruto et en quelques semaines, Nairobi annonce la fin de la reconnaissance de l'état fantoche de la RASD et son alignement sur le cadre onusien, c’est-à-dire sur la position marocaine. La "représentation sahraouie" à Nairobi se voit réduite, puis neutralisée. La rupture est discrète au début, mais elle ouvre la voie à une normalisation beaucoup plus profonde en 2023 et 2024. Le Kenya installe une ambassade à Rabat, son Sénat valide le renforcement des relations bilatérales, et Rabat accueille Jessica Muthoni Gakinya, première ambassadrice kenyane au Maroc. Les visites ministérielles se multiplient, les accords s’accélèrent (sécurité, renseignement, énergies renouvelables, engrais marocains contre thé et café kenyans), le partenariat devient solide. En mai 2025, Nairobi franchit le cap décisif d’une visite officielle à Rabat, ainsi, le Premier ministre Musalia Mudavadi affirme noir sur blanc que le plan d’autonomie marocain de 2007 est la "seule approche durable et crédible" pour régler définitivement la question du Sahara. C’est l’aveu explicite que le vieux tropisme pro-Polisario n’existe plus dans les cercles de décision kenyans. Les échanges commerciaux s’accélèrent, Rabat augmente ses exportations d'engrais pour réduire le déséquilibre chronique (93 millions USD d'importations kenyanes contre 3,8 millions d'exportations). De son côté, Nairobi y voit l’occasion de sécuriser ses besoins agricoles, un enjeu vital pour son économie. À l’été 2025, l’ambassadrice Gakinya présente ses lettres de créance à Nasser Bourita. Elle qualifie alors les liens avec Rabat de "pivots pour la paix en Afrique". Les ambitions communes s’étendent au tourisme,à l'énergie, à la sécurité régionale, et même aux enjeux africains comme la prochaine élection de la Commission de l’Union Africaine.
Mais c’est le 15 novembre 2025, à Laâyoune, que la rupture avec le Polisario s’est matérialisée concrètement. Menée par l’ambassadrice elle-même, une délégation économique et diplomatique kenyane de haut niveau a foulé la capitale du Sahara marocain. Accueillie par le wali Abdelsalam Bekrate et accompagnée par l’Agence marocaine de coopération internationale (AMCI), la mission a exploré les pistes de partenariat Sud-Sud directement sur le terrain. Une présence officielle kenyane à Laâyoune, qui fait montre du fait que Nairobi ne se contente plus d’ignorer le narratif du Polisario, elle en valide publiquement l’inverse. Une étape qui n’était même pas envisageable il y a cinq ans.
Pour le Polisario, la perte est immense. Le Kenya était l’un des derniers symboles diplomatiques qui lui permettait de maintenir l’illusion d’une base africaine solide. Aujourd’hui, ce bastion s’effondre, comme ce fut le cas au Ghana ou dans d’autres pays ayant compris que la seule solution viable reste le plan d’autonomie sous souveraineté marocaine. Le mouvement séparatiste tente désormais de se tourner vers le Nigeria pour limiter l’hémorragie, mais l’élan continental penche clairement vers Rabat. Même si certains parlementaires kenyans continuent à faire de la résistance symbolique, la ligne exécutive est définitivement marocaine.
Le Maroc et le Kenya y gagnent tous deux. Nairobi sécurise des engrais à prix compétitifs, une coopération énergétique dans les renouvelables, un appui sécuritaire précieux contre les réseaux terroristes régionaux, et l’accès aux marchés nord-africains. Rabat, de son côté, consolide son influence en Afrique de l’Est, ouvre un marché touristique de plus de 50 millions d’habitants et renforce son réseau diplomatique en période de consensus international croissant autour de sa position. Plus de 100 États reconnaissent déjà la pertinence du plan d’autonomie. Le Kenya vient renforcer ce bloc stratégique.
Ce rapprochement est une nouvelle preuve que le temps joue en faveur du Maroc. Le continent bascule vers une approche pragmatique, réaliste et tournée vers la stabilité. Pendant que certains continuent d’entretenir un conflit artificiel pour des raisons idéologiques dépassées, d’autres misent sur la coopération, le développement, l’intégration régionale et l’avenir du continent. Le choix est fait à Nairobi, il s’affirme chaque mois davantage, et il s’est affiché hier à Laâyoune avec une clarté impossible à ignorer.











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