ILHAM KADRI, CONQUÉRANTE MAROCAINE DE L’INDUSTRIE MONDIALE

Dans le paysage mondial de la science et de l’industrie, certains noms s’imposent par leur éclat, par leur détermination, par cette énergie qui traverse les frontières et rappelle au monde que le Maroc porte en lui une inépuisable capacité à faire naître des destins extraordinaires. Celui d’Ilham Kadri en fait partie. Née en 1969 à Casablanca, dans un foyer dépourvu de confort, elle grandit dans une réalité dure, où chaque avancée doit se conquérir. Élevée par sa grand-mère analphabète, femme de ménage, elle découvre très tôt que la dignité n’a rien à voir avec le niveau d’instruction : elle appartient à celles et ceux qui se battent, qui se lèvent tôt, qui croient que la connaissance est la seule voie vers la liberté.Cette grand-mère devient sa première école. Pas une école de livres, mais une école de principes : discipline, volonté, honnêteté, foi en l’effort. C’est cette éducation silencieuse, transmise à travers des gestes, qui donnera à Ilham Kadri sa trajectoire future.

Très vite, ses résultats scolaires attirent l’attention. L’excellence devient sa signature. Elle quitte Casablanca pour la France, où elle poursuit des études scientifiques à la prestigieuse École européenne de chimie, polymères et matériaux de Strasbourg, avant d’obtenir un doctorat en physico-chimie macromoléculaire à l’Université de Strasbourg. Ces années, loin de son pays, forgent son rapport au travail et à la rigueur. Elles deviennent la base solide sur laquelle elle bâtira l’une des carrières les plus impressionnantes du monde industriel.

Son parcours professionnel l’emmène ensuite au sein de groupes internationaux majeurs : Shell, UCB, LyondellBasell, Huntsman, Rohm & Haas, puis Dow Chemical. Chez Dow, elle travaille sur les technologies de l’eau et de l’osmose inverse, un domaine stratégique pour l’avenir de la planète. Les dirigeants y décèlent une personnalité capable non seulement de comprendre la science, mais de diriger l’innovation, d’organiser des équipes mondiales, de traduire la recherche en stratégie industrielle. C’est une qualité rare : être à la fois scientifique, décideuse et visionnaire.

L’étape décisive survient lorsqu’elle prend la tête de Diversey. Elle modernise le groupe, introduit la robotisation et la digitalisation dans les services d’hygiène, redéfinit la stratégie autour de la durabilité et du leadership technologique. Lorsque Bain Capital rachète Diversey, Ilham Kadri en est immédiatement nommée CEO mondiale, l’une des très rares femmes, et la seule Marocaine, à occuper un tel poste dans ce secteur.

En 2019, elle accède à une responsabilité historique : elle est nommée PDG du groupe Solvay, l’un des plus grands noms de la chimie mondiale. Elle y lance la stratégie « Solvay One Planet », une transformation profonde orientée vers la chimie durable, les matériaux avancés, les technologies bas carbone, les solutions pour batteries et mobilité électrique. Son mandat aboutit en 2023 à la scission de Solvay en deux entités. La division la plus innovante, tournée vers l’avenir de l’industrie mondiale, devient Syensqo. C’est tout naturellement Ilham Kadri qui en prend la direction générale, symbole d’un leadership qui inspire l’Europe, l’Afrique et le monde.

Son influence dépasse largement les murs de l’industrie. Membre active du World Economic Forum, du World Business Council for Sustainable Development et de l’European Round Table for Industry, elle participe aux grandes réflexions sur la souveraineté industrielle, la transition écologique, l’avenir des matériaux et les enjeux stratégiques du XXIᵉ siècle. Pendant la pandémie de Covid-19, elle crée le Solvay Solidarity Fund pour soutenir les employés dans 62 pays, rappelant qu’un dirigeant marocain n’oublie jamais que la réussite doit s’accompagner de solidarité.

Récompensée par de nombreuses distinctions internationales, dont la Légion d’honneur, elle figure régulièrement parmi les femmes les plus influentes du monde des affaires. Mais derrière les titres, les sièges de conseil et les projecteurs, il reste une vérité que la presse internationale souligne rarement : Ilham Kadri n’a jamais rompu le fil avec son pays. Elle raconte qu’elle a grandi sans eau potable dans la maison, qu’elle faisait ses devoirs à la lumière vacillante, et que sa grand-mère lui répétait que l’éducation est le seul héritage que personne ne peut vous voler.

C’est cette force intérieure, totalement marocaine, qui fait d’elle un exemple. Elle incarne cette génération de femmes du Royaume qui ont grandi dans les difficultés, mais qui ont forcé les portes du savoir, brisé les plafonds de verre et hissé le nom du Maroc au sommet des grandes industries mondiales.Son histoire rappelle à chaque jeune Marocain que la réussite n’est pas réservée à ceux qui naissent dans le confort, mais à ceux qui refusent les limites qu’on voudrait imposer à leur destin.