Rabat
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DISCOURS ROYAL DU 27 MARS 2002


Discours de S.M. le Roi Mohammed 6 prononcé à l'ouverture des travaux du Sommet Arabe à Beyrouth.


"Louange à Dieu, que la prière et la paix soient sur le Prophète, sa famille et ses compagnons,


Majestés, Excellences,


Altesses, Excellence,


M. le Secrétaire Général de la Ligue des Etats Arabes,


Mesdames et messieurs,


Il m'est très agréable de retrouver mes chers frères, les dirigeants des pays arabes, en terre libanaise ancestrale, pays de civilisation et de rayonnement. Je voudrais d'abord adresser mes vifs remerciements à Mon cher frère, son excellence Monsieur le Président Emile Lahoud ainsi qu'au vénérable gouvernement libanais pour les efforts laborieux qu'ils ont déployés afin que ce sommet puisse se tenir à la date fixée, particulièrement en ces circonstances délicates qui exigent de nous une volonté à toute épreuve pour que nous puissions retrouver notre rôle agissant, après que nous ayons perdu l'initiative concernant les questions les plus importantes pour nous.


Tout le monde, que ce soit au sein de la Nation Arabe ou ailleurs, suit nos travaux avec intérêt et attend les résultats qui en découleront. Nous nous devons donc de démontrer que nous sommes à la hauteur, capables de relever les défis et de prendre des positions responsables qui nous permettent de retrouver notre rôle influent et agir sur le cours des événements internationaux, au lieu de suivre, en spectateur, une politique d'attentisme qui nous met en marge de l'histoire, comme le souhaitent nos adversaires.


Les multiples approches que nous pouvons avoir, quant à la tournure prise par les événements et aux retombées des attaques du 11 septembre sur les relations internationales, ne doivent pas constituer pour nous une source de divergence, mais nous inciter plutôt à dégager un consensus en vue de parvenir à des positions fermes et efficientes, d'autant plus que notre objectif demeure le même.


Nous avons toujours opté pour la paix par conviction, et par choix délibéré. Cependant, l'autre partie n'a pas répondu favorablement aux initiatives sincères que nous avons prises et qui comportaient notre vision et notre conception de la paix, dans toutes ses dimensions. Comme cela a été le cas dans toute conjoncture difficile, voilà que notre Nation Arabe est au rendez-vous avec l'histoire, grâce à la sage initiative de notre frère,

Son Altesse Royale le Prince Abdellah Ibn Abdelaziz, prince héritier du royaume frère d'Arabie Saoudite.


Le Royaume du Maroc a salué cette initiative judicieuse qui, outre ses nobles objectifs et le fait qu'elle intervient au moment opportun, exprime une volonté arabe sincère d'instaurer une paix juste, durable et globale. Le Maroc avait invité, en son temps, la communauté internationale à accueillir favorablement cette initiative en tant que démarche nouvelle et prometteuse soutenant les efforts internationaux pour faire sortir la région de l'impasse.


Je vous invite - mes chers frères, les dirigeants des pays arabes - à soutenir unanimement cette initiative en en faisant un plan d'action arabe afin que nous soyons en phase avec le projet arabe pour la paix que nous avons adopté au sommet de Fès en 1982. Il s'agit aussi pour nous d'être conséquents avec notre ferme attachement à la paix qui était à la base de la participation arabe à la conférence de Madrid, conformément à la légalité internationale, et en accord avec notre message civilisationnel, lequel est fondé sur la paix et la coexistence. Les ennemis de la paix ont fait avorter de nombreuses initiatives arabes et internationales en la matière. Aussi et pour que notre histoire ne soit pas celle des occasions perdues, ne devons-nous pas nous contenter de l'unanimité arabe autour de l'initiative saoudienne, car cette unanimité n'est pas une fin en soi, mais plutôt un point de départ pour le déploiement d'une action soutenue visant à mobiliser, en sa faveur, le soutien international le plus large et le plus agissant qui soit, afin d'en garantir la mise en oeuvre concrète et optimale.



Majestés, Excellences, Altesses


La tournure dangereuse qu'ont prise les événements dramatiques dans les territoires palestiniens, après que le gouvernement israélien ait usé de tous les moyens militaires et de destruction, témoigne de la vision étriquée d'Israël et de sa persistance à faire prévaloir la logique de la force, qui ne peut qu'exacerber la violence, renforcer la résistance du peuple palestinien désarmé et nourrir les sentiments de désespoir et de frustration, même parmi les Israéliens. Il n'y a d'autre voie, pour mettre un terme à cette situation dramatique, que d'arrêter le cycle de violence et de contre-violence, et de stopper les violations quotidiennes du droit humain naturel à la vie, et l'effusion du sang des innocents. Il n'y a, en effet, d'autre issue que le retour immédiat, inconditionnel et sans préalable à la table des négociations ainsi que le respect loyal et sincère des décisions de la légalité internationale, des accords et initiatives agréés par les parties concernées à ce sujet, et soutenus par la communauté internationale, et plus particulièrement, dans la conjoncture délicate actuelle, le rapport de Mitchell et le plan George Tenet, qui sont, du reste, complémentaires.


Le Maroc réaffirme son appui constant pour ces initiatives et pour toutes les démarches sincères visant à apaiser la situation dans la région, à instaurer la sécurité et à créer un climat de confiance et les conditions d'une vie paisible pour tous ses peuples, dans le cadre de leur entité nationale indépendante, et dans un esprit de coexistence et de complémentarité entre ces peuples.


Toutefois, la paix que nous voulons et pour l'instauration de laquelle nous œuvrons, ne peut se concrétiser que par le retrait d'Israël de tous les territoires arabes occupés en 1967, y compris les territoires palestiniens, le Golan syrien et les contrées libanaises spoliées. De la ville de Beyrouth, témoin du défi de notre frère, le combattant, son excellence le président Yasser Arafat, à l'égard d'un blocus israélien non moins cruel que le siège inique que lui ont imposé les autorités d'occupation israélienne, de cette ville donc, je voudrais adresser au frère Abou Ammar les assurances de mon hommage et de ma solidarité, tout en lui renouvelant l'appui, fort et constant, du Maroc à sa conduite ferme et tenace de la lutte du peuple palestinien frère pour établir son état indépendant, avec pour capitale, Al-Qods Acharif.


En ma qualité de président du Comité Al-Qods, je réaffirme que la ville qui est le berceau des religions, doit demeurer arabe et islamique, et rester un espace de coexistence et de tolérance entre les religions célestes et qu'il ne pourrait en être autrement pour cette ville sainte, quelles que soient les circonstances et les prétextes que l'on pourrait invoquer.



Majestés, Excellences, Altesses,


Notre sommet intervient après les actes terroristes perpétrés contre les états d'Amérique, l'année dernière. La ferme condamnation par le Maroc de ces actes criminels n'a d'égal que son appel pressant en faveur de l'adoption d'une approche globale pour extirper le terrorisme de ses racines et en éliminer les causes. Nous avons également insisté pour que soit maintenue la cohésion de la campagne internationale contre le terrorisme, en s'en tenant aux véritables auteurs et instigateurs du terrorisme, et sans s'étendre à d'autres pays, sous n'importe quel prétexte. ces événements, entre autres retombées, ont été malheureusement instrumentalisés par certains milieux malintentionnés pour porter atteinte à nos valeurs islamiques tolérantes et à notre civilisation séculaire.


Il est donc de notre devoir de contrecarrer cette campagne inique pour réaffirmer au monde entier que l'islam bannit le terrorisme et prêche l'amour et la paix, la fraternité et la coexistence. Cela exige l'établissement d'une stratégie rigoureuse et constante qui permette de suivre, en s'adressant aux haineux, une démarche rationnelle et efficiente où se conjuguent l'acte et la parole.


La place à laquelle nous aspirons dans le monde d'aujourd'hui requiert, comme l'avait affirmé le Maroc au sommet d'Amman, le développement de nos économies, l'amélioration des conditions de vie de nos peuples, et une bonne appréciation des impératifs dictés par les mutations rapides qui s'opèrent dans le monde. Il semble toutefois que nous n'ayons pas encore trouvé la méthode idoine pour sortir de l'étape des souhaits et des vœux. De même, toutes les mesures prises dans le cadre des mécanismes traditionnels de l'action arabe commune, se sont révélées incapables de concrétiser nos aspirations. Par conséquent, il nous incombe d'adopter une nouvelle démarche, de créer des initiatives novatrices, audacieuses et concrètes, pour mettre en place un espace économique intégré, qui nous permette de mobiliser toutes nos énergies au service d'un développement arabe durable.


Cette approche, déjà empruntée par de nombreux états du Sud qui ne sont pourtant pas unis par des liens aussi nombreux et solides que ceux qui nous unissent, est de nature à permettre aux peuples arabes d'aborder l'avenir avec un espoir accru et de leur faire sentir que nous partageons pleinement leurs soucis et leurs préoccupations concernant leur vie et leur réalité vécue.


Permettez que nous nous félicitions tous de la tenue de ce sommet en cette étape délicate et que je réitère, encore une fois, mes sincères remerciements et ma gratitude à notre cher frère, Son Excellence Monsieur le Président Emile Lahoud, et à travers lui, au gouvernement et au peuple libanais frère pour l'attention fraternelle et l'hospitalité généreuse dont ils nous ont entourés et pour avoir facilité le déroulement des travaux de ce sommet béni.


Que la paix, la miséricorde et la bénédiction de dieu soient sur vous".



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