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IGÎLÎZ, LA MONTAGNE QUI A CHANGÉ LE DESTIN DU MAROC

  • 17 sept.
  • 2 min de lecture
IGÎLÎZ, LA MONTAGNE QUI A CHANGÉ LE DESTIN DU MAROC

Nichée dans l’Anti-Atlas, à une soixantaine de kilomètres au sud-est de Taroudant, la montagne d’Igîlîz occupe une place singulière dans l’histoire du Maroc. Ce site, longtemps enfoui dans l’oubli, est aujourd’hui reconnu comme le lieu de naissance d’Ibn Tûmart, figure emblématique du XIIe siècle, juriste et théologien amazigh à l’origine du mouvement réformateur qui allait bouleverser l’Afrique du Nord : l’Almohadisme.


Dans les années 1120, Ibn Tûmart entame ses premiers prêches auprès des tribus montagnardes de l’Anti-Atlas et du Haut-Atlas. Ses idées réformatrices trouvent un écho puissant, lui permettant de rallier à sa cause de nombreuses tribus. Entre 1120 et 1124, il mène ses premières confrontations contre les Almoravides, posant les bases d’une lutte qui allait changer le destin du Maroc médiéval.Chassé par ses rivaux, il trouve refuge à Igîlîz, avant d’installer son quartier général à Tinmel, au cœur du Haut-Atlas, qui deviendra plus tard la véritable capitale spirituelle et militaire des Almohades. Si l’histoire associe souvent la naissance de la dynastie à Tinmel, c’est bien à Igîlîz que naquit son fondateur et que débuta l’élan révolutionnaire.


Connue par les sources médiévales mais introuvable sur le terrain, la forteresse d’Igîlîz restait une énigme pour les archéologues du XXe siècle. Ce n’est qu’en 2004, grâce à une mission archéologique franco-marocaine menée par l’Université d’El Jadida, l’Université Paris-Sorbonne et l’INSAP, que le site fut enfin localisé et étudié.Les fouilles ont révélé une forteresse médiévale stratégiquement perchée, dominant vallées et montagnes, conçue pour assurer protection et autonomie.


Les recherches ont mis en lumière des éléments précieux : fragments de céramiques, couches stratigraphiques et datations au radiocarbone confirmant une occupation intense du site au XIIe siècle. Ces découvertes témoignent de l’existence d’une communauté montagnarde organisée, soucieuse de gérer ses ressources naturelles et de préserver son indépendance face au pouvoir almoravide.Elles ont également permis de mieux comprendre les pratiques religieuses et rituelles de l’époque, donnant un éclairage inédit sur le processus d’islamisation d’une société tribale réticente à toute domination centrale.


Igîlîz apparaît ainsi comme un laboratoire politique et spirituel. C’est là qu’une communauté de religieux et de guerriers, guidés par Ibn Tûmart, a bâti les fondations d’un mouvement qui allait, en un quart de siècle, déboucher sur la création de l’Empire almohade. Ce site incarne une réflexion profonde sur la relation entre tribu et État, thématique qu’Ibn Khaldoun, au XIVe siècle, développera dans sa célèbre analyse du pouvoir.


Le site d’Igîlîz n’est pas seulement un vestige archéologique : il est un symbole de résistance et de renouveau. Il rappelle que le Maroc médiéval fut une terre d’idées, de luttes et de puissance, dont l’influence s’est étendue bien au-delà de ses frontières.



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