Le Maroc est probablement le pays arabe, en l'occurrence le pays le plus berbère du monde arabe, qui a les meilleures relations avec les juifs de sa diaspora. Celui-ci revendique la marocanité de son identité, et de nombreux discours politiques, films, travaux historiques ou institutions évoquent cette judéité marocaine, et une mémoire commune historique.
Il aime à rappeler qu'il a accueilli les juifs chassés d'Espagne après 1492, et le Palais s'honore de les avoir protégés sous Vichy. Ajoutons que le SM le roi Mohammed 6 est un des rares chefs d'État arabes à avoir un conseiller juif. Mais, dans ce pays qui comptait plus de 265 000 juifs autochtones en 1948, où sont-ils passés et pourquoi sont-ils partis ?
On estime, au début du 21e siècle, que la population juive d'origine marocaine compterait plus d'un million de membres à travers le monde, dont à peine plus d'un ou deux milliers de personnes au Maroc, en majorité âgées, de sorte que sa survie n'est plus assurée. Les deux dernières communautés vivent notamment à Casablanca et, pour la plus importante, à Mellila (Espagne).
L'immense majorité des juifs marocains réside donc à l'étranger, et principalement en Israël. Ils y seraient de 700 000 à 800 000, formant la deuxième communauté nationale après l'arrivée des Russes au début des années 1990. Chaque année, des milliers de juifs marocains viennent visiter les tombes de leurs ancêtres et surtout celles de leurs saints au Maroc. Le pays accueille aussi des hommes d'affaires et divers conseillers israéliens de passage.
Le reste de la communauté se trouve principalement en France et au Canada, mais aussi dans le reste de l'Europe de l'Ouest et aux Amériques. Pourquoi cette communauté si ancienne et si importante a-t-elle quitté son pays natal pour aller former en Israël une population pauvre, initialement marginalisée et analphabète, à tel point qu'elle est devenue un des socles des partis conservateurs les plus religieux ou les plus nationalistes ? Alors que les autorités marocaines se montrent a priori favorables envers elle. Feu SM Hassan 2 appelait ses membres « mes juifs ».
Lors de la naissance d'Israël et de la guerre en 1948, de violentes émeutes antijuives causent la mort de 44 victimes dans la région orientale du Maroc, ce qui déclenche un premier exode de 18 000 personnes, qui se poursuit à chaque guerre du Moyen-Orient (en 1956 après le massacre de Meknès, qui frappe surtout des Français, puis en 1967) et à chaque drame de la décolonisation, accéléré par l'Agence juive qui vient chercher des juifs marocains. Le Feu Mohammed 5 interdit les départs en 1956. En 1967, la communauté tombe à 70 000 personnes, puis l'exode s'accélère brutalement : il reste 10 000 personnes en 1989. En quarante ans, la deuxième plus importante communauté juive du monde arabo-musulman après l'Irak s'est effondrée, et tend à disparaître au début du 21e siècle. Ce départ n'en laisse pas moins un vide et l'on évoque fréquemment cette part amputée de la personnalité marocaine.
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