La réponse est inscrite à l'article 3 de la Constitution marocaine en vigueur: « L'islam est la religion de l'État. » Cette proposition est immédiatement suivie d'une pondération qui différencie le Maroc de l'Arabie Saoudite, puisque l'État marocain garantit à tous le libre exercice des cultes. Mais cette seconde proposition relative n'est que partiellement vraie.
D'abord, elle s'adresse de manière implicite aux seules religions juive et chrétienne, les autres n'étant pas reconnues par le Coran, ce qui n'interdit pas pour autant l'accès du territoire à des étrangers bouddhistes, par exemple.
Les communautés juive et chrétienne peuvent donc exercer librement leur culte. Mais il est hors de question que des musulmans marocains se convertissent au christianisme ou au judaïsme. L'appartenance à une religion autre que l'islam ne pose pas de problème dès lors que les croyants sont étrangers.
Officiellement, en effet, il n'y a aucun chrétien marocain connu, et les prêtres et les pasteurs exerçant au Maroc, qui sont tous étrangers, ne sont pas autorisés à faire de prosélytisme; tout baptême d'enfant musulman connu serait une source d'ennuis si considérables qu'aucun religieux ne s'y risque. De temps à autre, des pasteurs protestants accusés de prosélytisme sont expulsés du pays. La chose est différente pour les juifs puisque leur religion est plus ancienne que l'islam au Maroc, qu'elle s'y est toujours perpétuée, et que le calife les protège officiellement. Toutefois, pour des raisons politiques, économiques et de sécurité des personnes, presque tous les juifs du pays ont quitté le royaume.
L'islam est donc non seulement la religion de l'État, ce qui est bien le moins dans un système politico-religieux régi par un calife Commandeur des croyants, mais il est aussi la religion de la quasi-totalité du peuple. Il y a bien sûr des Marocains qui ont des rapports variables au religieux, allant du mysticisme le plus complet jusqu'à l'athéisme. L'interdit ne provient pas forcément de l'État car la société se charge de faire appliquer ou respecter l'islamité implicite. En revanche, libre aux croyants de vivre en mécréant pourvu qu'ils se taisent.
L'article 4 de la Constitution spécifie que la devise du royaume est Dieu, la Patrie, le Roi. Dans le chapitre consacré au souverain, les fonctions de Commandeur des croyants, qui est chef de l'État, sont définies de manière précise à l'article 41 : Le Roi, Amir Al Mouminine, veille au respect de l'Islam. Et à nouveau, par effet de balancement à l'article 3, stipulant qu'il est le Garant du libre exercice des cultes. Le roi est le chef de l'islam marocain, en tant que président du Conseil des oulémas, qui possède le monopole d'édiction des fatwas. Cette disposition, qui n'était pas en vigueur sous Feu Hassan 2, a été inscrite dans le droit constitutionnel sous SM le roi Mohammed 6 ; elle est importante, puisque le roi est non seulement le chef de l'islam, mais comme il n'y a pas d'instance islamique autonome échappant à sa tutelle, la religion de l'État est incarnée dans la personne même du roi chef de l'État. L'article 41 se conclut ainsi : Le roi exerce par dahirs les prérogatives religieuses inhérentes à l'institution d'Imarat Al-Mouminine (la Commanderie des croyants) qui Lui sont conférées de manière exclusive par le présent article. L'État, Dieu et le roi sont consubstantiellement mêlés au Maroc.
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